22 févr. 2013

Renaissance

Comme un serpent qui mue, je perds ma peau; elle craquèle, se détache, tombe, s’effrite. Le jour va bientôt se lever, il est sur moi, je sens la douceur des rayons du soleil nourrir ces minuscules fragments qui se forment et me donneront mon nouveau manteau dans lequel se reflètent déjà mes succès, mes nouvelles amitiés, mes amours de lumière.

J’ai pensé un moment me comparer à un oiseau perdant son plumage. La comparaison reptilienne est plus adéquate. Même si la mue est indolore, l’image en elle-même crie la douleur.  Une plume se détache simplement, s’envole avec grâce ; elle ne saurait que s’en aller voltiger doucement, caresser les joues des enfants et des amoureux, avant de se poser d’un mouvement voluptueux à un endroit où elle sait que celui-là même qui l’a perdue s’empressera de la ramasser soigneusement pour la déposer avec non moins de précaution et d’amour sur la branche accueillante où il aura choisi de faire son nid.

Le serpent ne ramasse pas sa peau. Et si un quelconque collectionneur ou chercheur ne vient la ramasser, si un enfant ne l’exhibe fièrement, toute pâle et morte qu’elle soit, elle se perd en miettes loin des regards, des nids et des branches, confondues dans la poussière et la pierre d’où elle n’est jamais sortie. Mais, au moment de se coucher définitivement en terre, n’ayant rien perdu de son orgueil, elle se recroqueville silencieusement sur elle-même dans un dernier soubresaut de douleur digne, et vient mourir au pied de la pierre où celui qui l’arborait majestueusement s’endort le temps de s’envelopper d’une autre pèlerine.

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