31 juil. 2008

Salloukh à Téhéran

Notre ministre des Affaires étrangères est à Téhéran, pour représenter l’Etat libanais à la Conférence des pays non-alignés…
La blague !

Le concept initial des non-alignés est aujourd’hui largement dépassé.
Né en 1955, en pleine guerre froide, il regroupe toujours (ou presque) les mêmes Etats qui ont refusé le clivage URSS/USA, espérant ainsi créer une espèce de « Troisième force ».

Les questions qui se posent, plus de 50 après, sont les suivantes :
D’abord le concept de non-aligné est-il toujours d’actualité ? Aujourd’hui, tous les Etats, même le Nauru ou le Palau sont polarisés !
Ensuite, « non-alignés » à quelle politique ?

Par exemple, l’URSS et les Etats-Unis sont aujourd’hui plus proches que l’Iran et les Etats-Unis.

Si le pôle américain est toujours en tête de l’un des axes, le pôle soviétique, lui, n’existe plus. Il n’y a plus à avoir peur d’un éventuel expansionnisme communiste.
Ce qu’il faut craindre aujourd’hui, c’est la montée en force de l’intégrisme islamique.
Ou de l’ « Axe du Mal » (Syrie-Iran).
Le Bloc de l’Est est aujourd’hui remplacé par plusieurs axes, qui s’opposent à l’Oncle Sam (lequel n’est par ailleurs pas un saint, mais il reste le leader de l’une des politiques mondiales majeures).

Le plus drôle dans l’histoire, c’est que cette année, la conférence des pays non alignés se tient à Téhéran !
Bon, on s’en souvient, l’Iran est l’un des fondateurs du mouvement des non-alignés.
Mais aujourd’hui, l’Iran est l’aligné par excellence !

Alors,
« Que va dire Salloukh à Téhéran, au sujet de l’impasse politique au Liban ? »
S’interroge Khalil Fleyhane dans l’Orient-LE JOUR.

Eh bien, en bon ministre des Affaires étrangères, Salloukh ne devrait strictement rien dire au sujet de la politique interne.

La Conférence des non-alignés est née pour servir la politique externe.

Merci, M. Salloukh, d’éviter de trainer le nez (un peu long) des Iraniens dans nos affaires internes.
Vous devez être le premier à savoir que le vice-président iranien ne se prive pas d’annoncer en public (aux médias d’ailleurs) qu’une percée dans les négociations entre Téhéran et l’Occident, au sujet du nucléaire iranien, contribuerait à la stabilité de la région…
Et il cite nommément le Liban !

Vous qui avez si souvent prôné la non-ingérence, M. Salloukh, tentez aujourd’hui de garder notre linge sale à laver en famille ; nous ne désirons aucunement nous allier à l’un des axes.
Vous qui avez appelé à restaurer la « Suisse du Moyen-Orient », veuillez, s’il vous plaît, respecter l’une des constantes de cette Suisse :
La Neutralité !

A naïf, naïf et demi

La « naïveté » du Président,
… qui parle d’ « affection » entre le Liban et la Syrie.
Oui, Monsieur le Président, mais trop d’affection vous étouffe, et cela a été prouvé, sans discontinuité au fil des décennies…

Certes, il ne s’agit pas de rester perpétuellement en guerre, ou d’entretenir des liens d’animosité.
Mais l’affection, Monsieur le Président, n’est-ce pas un grand mot ?

« Si le Liban est divisé, instable, troublé, la Syrie également en pâtira », avez-vous clamé (de bonne foi, j’ose le croire).
Mais Monsieur le Président, avez-vous oublié que la Syrie elle-même fomente les troubles internes au Liban ? Qu’elle nourrit la division interlibanaise ? Qu’elle en est le principal bénéficiaire ?

Que faites-vous de toutes ces années où le régime syrien oeuvrait à l’instabilité du Liban ?
Que faites-vous des premières semaines de votre mandat naissant, où la Syrie, par l’intermédiaire de ses alliés locaux, faisait – et fait toujours preuve – d’une imagination vaste et inépuisable pour affaiblir le Liban ?


Vous n’êtes pas né de la dernière pluie, Monsieur le Président.
Nous non plus.

Bon nombre de citoyens avaient mis leurs espoirs en vous, lorsque vous aviez vaincu des groupes extrémistes à Nahr el Bared. Des groupes dirigés, tout le monde le sait, par le régime Baath.
Quoique nous nous soyons posé des questions au sujet de la « fuite » de leurs chefs…
Mais bon, voilà que vous décevez… Tout comme votre prédécesseur…

J’ose croire que ce que vous dites, c’est uniquement par souci diplomatique. Ou naïveté. Parce que la naïveté, il en faut ; le régime syrien ne laisserait pas un homme intelligent, qui s’oppose à ses projets, accéder à la tête de l’Etat libanais…

Je souhaite de toute mon âme que vous soyez (uniquement) naïf, Monsieur le Président.

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